"... a mighty woman with a torch, whose flame is the imprisoned lightning..." [LIBRE]

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Is the imprisoned lightning ~

Pour rejoindre Liberty Island, le public devait emprunté un ferry, qui partait à heures régulières, et bien entendu, tout ce qui pouvait rapporter de l'argent était plutôt cher, de la traversée à la visite de la très célèbre Statue de la Liberté. La seule chose qui importait vraiment à un homme comme Terence Lester Firestone, c'était le côté financier. Le tourisme rapportait beaucoup d'argent à l'Etat, et il faisait partie de ceux qui géraient ces rentrées d'argent. Non, en fait, il y avait une seconde chose, plus futile. Se trouver au sommet de la statue, appuyé contre la rambarde de la torche, c'était un plaisir particulier. Et qu'il s'offrait de temps à autre.

Terence avait une particularité : il n'était pas "le public". Le badge qu'il portait le signifiait, et de toute manière, les employés ne connaissaient que trop bien son visage. Le directeur de la Banque nationale avait sa vedette particulière, qu'il prenait pour traverser les eaux calmes séparant Manhattan de Liberty Island. Où qu'il laisse son bateau, on ne lui disait jamais rien, sous peine de s'attirer ses foudres ou, pour être plus exact, ses flammes. Le caractère de l'individu avait une fois fait des dégâts, et plus personne n'osait le contrarier, sous peine de passer un séjour prolongé à l'hôpital, au service des grands brûlés.

"Monsieur Firestone." le salua un garde au pied de la statue, juste avant les portails de sécurité.

En réponse, il n'eut rien, pas un mot, pas un regard. Terence sortit une cigarette, qu'il se colla dans la bouche tout en grimpant les escaliers. Il entendit quelques touristes protester derrière lui, mais ne prit pas la peine d'aller leur répondre. Que les gardes se débrouillent pour expliquer la situation. Là, Firestone était dans une humeur assez étrange. Il n'était pas en colère, mais il n'était pas non plus prêt à engager une conversation avec n'importe quel pecnot. Durant son ascension, il posa le bout de son index sur l'extrémité de sa cigarette, et bientôt il laissa déjà de la fumée dans son sillage.

Parvenu au niveau de la tête, il s'attira des regards noirs. Le lieu était non fumeur, bien entendu. Mais personne n'osa en faire la remarque. Les gens étaient tellement prévisibles, tous les mêmes... Ils pensaient tous la même chose, mais pas un n'avait le cran de dire tout haut les reproches que tous auraient bien pu lui faire. En rejoignant l'escalier suivant, il bouscula un homme qui faisait une vingtaine de centimètres de plus que lui. Ce dernier s'apprêta à râler, mais en croisant le regard du chef des collaborateurs, il ravala sa remarque.

"Tapette." lâcha Terry, avant de reprendre son avancée.

Et enfin, il déboucha au sommet. Prenant une grande inspiration, il se tourna vers Manhattan. Ah, Manhattan. Le grand quartier d'affaires, le centre financier et bancaire, le siège de son empire. Car c'était là la raison de sa présence : admirer cet endroit si particulier dont il contrôlait une grande partie. Une touriste le dérangea dans sa contemplation. Lui tapotant l'épaule, elle lui fit comprendre par gestes et avec un Anglais plus qu'approximatif qu'elle désirait qu'il la prenne en photo, avec son mari. Ah, ces Japonais. Terence prit l'appareil, sans mot dire, et le jeta par-dessus la rambarde.

"Allez vous faire voir." cracha-t-il, en leur tournant le dos.

Voilà l'inconvénient de venir à cette heure-ci : les touristes. Heureusement pour le couple, l'histoire fut sans suite. Un barbecue au sommet de la Statue de la Liberté aurait fait tache. Terence reprit sa contemplation, espérant ne plus être dérangé.

Le matin c'est toujours un bon moment. Parce que le matin et bien. C'est après le soir. On ne peut pas dire que Jàck avait la trouille de la nuit. Mais toujours une petite appréhension. Les ennuis viennent toujours une fois la nuit tombée. Donc dès le premier rayon de soleil, on est forcément en sécurité non ? En tout cas telle est la philosophie de Jàck Campillo, alias Medic.

La tête enfarinée, le jeune homme descendit de son lit et enfila en vitesse ses pantoufles. Le genre de pantoufle bleu bien kitsh qui aurait fait un malheur dans n'importe quelle série B américaine. Le seul ennui étant que Jàck n'était pas un vieux père de famille et qu'il n'a jamais joué dans la moindre série. A vrai dire, la seule fois où le jeune homme est passé à la télé, c'était lors d'une interview pendant une manifestation de protestation contre la hausse du prix du sucre. On peut accepter 2% mais pas 3% ! Imaginez le prix de revient des confitures après ! Et pire, des pâtes de fruits. Bref, continuons.

Après avoir avalé une barre céréalières aux fruits caché dans sa chambre, Medic glissa sous une douche de l'institut pendant une bonne demi-heure, le temps nécessaire pour sortir intégralement de sa nuit. Une fois propre, rasé et presque coiffé, Jàcky se décida pour un ensemble noir surmonté d'un blouson en cuir noir et une paires de lunettes...noires. Le dilemne arriva après. Trois paires de chaussures. Deux minutes de réflexion lui furent nécessaires pour qu'il prenne les rangers flambantes neuves. Il n'avait pas cours aujourd'hui, autant en profiter non ?

Il commençait à se diriger vers la sortie quand il fut pris d'une inspiration soudaine. Direction le garage. Il sortit de son blouson une paire de clefs et se dirigea vers une moto en particulier. Une Suzuki noire. LA SUZUKI NOIRE ! Utilisant la première clef, il ouvrit le coffre du véhicule et en sorti une arme de poing qu'il rangea sous son blouson. Un Smith & Wesson Springfield 1911. Avec tout les mutants du coin, on est jamais trop prudents. Et pas que les mutants en fait. Y'a pas mal de gens qui peuvent lui en vouloir. Pas pour une raison précise. Mais un mutant sa attire pas les masses. Enfin pas dans le bon sens. Bref, quand on à pas de pouvoirs offensifs, on s'en crée. Et le sien était à base de balles d'acier de 9 minimètres de diamètres.

Histoire de faire le touriste, étant donné son arrivé récente en ville, il décida de visiter le piège à pigeons local, la statue de la liberté. Il roula d'abord deux heures au hasard dans les rues de la ville, savourant la vitesse. Puis il gara son véhicule avant de faire la queue pour le Ferry. 35 Foutus dollards. Heureusement que Feu le père était riche. Le voyage en bateau était calme, l'eau verte clair lui faisait penser à Leslie. Tss...leslie. Est-ce qu'un jour elle comprendra qu'elle ne lui plait pas qu'en amie ? Jàck soupira lentement. Bah, il n'y a pas que ça à faire aujourd'hui. Arrivé sur l'île, il circula au milieu des touristes avant de monter assez haut et de s'accouder à une balustrade en hauteur. Il vit quelque chose de compact tomber, sa aurait pu ressembler à un appareil photo. Mais il faudrait être con pour lancer un appareil photo à cette hauteur là. Jàcky renifla et sentit une odeur familière. Sans cesser de regarder à l'horizon, il lâcha, sur le ton de la discussion un peu blazée :

Vous savez que fumer, c'est pas bon pour la santée ?

Une façon comme une autre de commencer une discussion...

Pendant quelques secondes, le regard de Terence demeura immobile, fixé sur l'Empire State Building, que l'on pouvait apercevoir entre les autres gratte-ciel. Ah, un jour, pourquoi pas, il ferait en sorte d'avoir son bureau au dernier étage. Avec l'appui du gouvernement, il avait l'intention de fonder sa propre compagnie bancaire et financière, qui deviendrait alors le partenaire privilégié de l'Etat fédéral. La banque nationale existerait toujours, mais elle ne serait plus qu'un organisme intermédiaire entre les vrais acteurs de la scène économique des Etats-Unis. Oui, Terence avait des rêves de grandeur. Mais il y avait d'autres personnes, dans cette ville, qui avaient la fâcheuse tendance à vouloir donner leur avis sur tout, surtout dans les moments où c'était malvenu.

"Vous avez que fumer, c'est mauvais pour la santé ?"

Le chef des Collaborateurs ferma les yeux, prenant une profonde inspiration. Puis il se tourna, très lentement, vers la source de cette nuisance sonore. Le tout dû prendre une bonne quinzaine de secondes, temps nécessaire à Terence pour ravaler son envie d'être violent avant même d'avoir dit un seul mot. Il n'était pas très grand, il était même plutôt petit, mais il se considérait comme une illustration parfaite de toutes les expressions qui disent qu'il ne faut pas se fier aux apparences. C'est donc tendu, mais résolu à ne pas se laisser emporter, que Terry se trouva face à... un jeune homme. Ce garçon devait avoir, quoi, vingt-cinq ans ?

"J'ai dû rater la pub qui le rabâche sans cesse à la télé." dit-il, sans se soucier de savoir si l'ironie qu'il y mit allait vexer le jeune ou pas.

S'il y avait bien quelque chose dont il se moquait, c'était de chagriner les autres, les décevoir, ou même les blesser. En revanche, s'il les rendait heureux, ça l'embêtait, surtout si ça n'était pas son objectif. Y a pas écrit "Santa Claus". Pendant un court instant, il détailla l'importun. Le genre à passer plus de temps qu'il ne faut dans la salle de bain pour soigner son apparence. Pathétique. Bien sûr, être présentable était important, surtout en société, mais il y avait une limite à la connerie.

"Pour être aussi... moralisateur, tu ne dois pas avoir bien compris qui je suis... Mais je te pardonne, on ne doit pas fréquenter les mêmes milieux."

Après l'ironie, le ton avait le mérite d'avoir une certaine franchise. Le garçon, oh, peut-être n'avait-il que la vingtaine, finalement, devait être un étudiant. Un étudiant plutôt bien loti, mais un étudiant quand même. Donc, il n'avait pas encore eu l'occasion d'avoir un bon aperçu de la vie, et surtout ses mauvais côtés. Reprenant finalement sa contemplation de la Grosse Pomme, le Collaborateur lâcha :

"Alors comme ça, t'es un pigeon, comme tous ces touristes... Faut le vouloir. Mais bon, c'est l'Etat qui en profite."

Aspirant la dernière bouffée de sa clope, il la jeta ensuite, l'envoyant prendre le même chemin que l'appareil photo. Une nouvelle cigarette à la bouche, il l'alluma de la même manière que la précédente, en posant simplement le bout de son doigt sur l'extrémité. Oh, même si Jackie boy le voyait, c'était le cadet de ses soucis. Tous ceux qui le connaissaient étaient parfaitement conscients de sa nature. D'ailleurs, il valait mieux qu'ils soient au courant : le patron des Collabos est forcément un Mutos, non ?

Jàcky pensait un peu à tout. Ou à rien. Dans tout les cas, il pensait à quelque chose. Mais rien d'important. Quand il sentit l'homme tourner le regard vers lui, il jeta un coup d'oeil rapide, sans quitter son appui contre la balustrade. Un vieux en plus... Un bonhomme qui allait lui expliquer par a + b qu'il fumait parce que c'était les affaires, que la vie était dure, que de son temps, les éléphants dansaient sur trois pattes et non quatres... Le genre de bonhomme qui essaie de se donner un air sérieux. En fait, c'était un nabot. Enfin, un homme pas très très grand. On ne peut pas dire que Jàcky ait été un exemple de grandeur, mais il était dans la norme. La bonne norme. Pas celle des vers de terres fumeurs.

Jàcky eut un petit sourire quand il sortit ce que l'étudiant prit pour une boutade. Au moins le vieux avait de la répartie. Amusant :

Ce n'est pas de ma faute si vous vous endormez devant les simpsons... Normalement, les pubs de prévention passent entre les annonces pour les produits de vaisselle et celles des rencontres coquines.

A vrai dire, Jàck n'avait aucune idée de l'ordre des publicités, ni même de la chaine où passaient les Simpsons. Mais bon, quitte à continuer dans le délire... Finalement le vieu avait pas l'air si méchant. Il semblait juste un peu frustré d'avoir perdu son appareil photo non ? Il se concentra sur un toit en particulier. Un toit vert. Et le toit vert lui apporta la conclusion. L'homme était en réalité frustré car il rentrerait trop tard pour coucher ses gosses. Comme n'importe quel banal homme d'affaires.

Il haussa alors un sourcil à la phrase suivante. Il était prétentieux ....ou prétentieux ? Qu'importe... :

A vrai dire, j'en ais aucune idée de qui vous êtes. Et, autant vous l'avouer, j'en ai pas grand chose à cirer. Ensuite, pas besoin de me pardonner. Vous êtes peut-être jaloux car vous allez dire que vous avez travaillé dur comme votre père et votre grand-père depuis la huitième génération, et que c'est pas normal que vous soyez toujours en bas de l'échelle sociale, mais pas besoin de viser ma place. Vous êtes juste né du mauvais côté de la balance non ? C'est la différence entre vous et moi. Sincèrement, sans vouloir vous offenser.

Jàck avait parlé sans la moindre once de méchanceté dans la voix, établissant juste un fait. A vrai dire, il en avait marre des "pauvres" qui râbachaient le fait qu'on était pas du même milieu, blablabla. Le corps, lui, est formé pareil, quelque soit la couche sociale. Medic était bien placé pour le savoir.

Il entendit alors l'homme l'appeler pigeon. Car il dépensait de l'argent comme un touriste. Et alors ? Sa fait parti des trucs qui aident à se sentir bien. Le touriste moyen est d'excellent humeur, il visite. Même s'il faut dépenser deux-cents foutus dollards pour une journée, autant se faire plaisir. Et quand on sait que c'est l'état qui rachete l'or des mines patriarcales de toute façon, on ne perd pas au change :

Un pigeon. Oui, et alors ? C'est le genre de chose que j'assume. Sa ne vous arrive jamais d'avoir envie de découvrir quelque chose de nouveau ? Et bien là, c'est ce que je suis entrain de faire. Je vais en haut d'un batiment inconnu, et je parle à un parfait inconnu. Je change mon quotidien. Car le votre doit être particulièrement.... morne non ?

Il tourna un instant la tête en entendant le froissement de paquet de cigarettes et vit l'homme en sortir une avant de l'allumer.....sans rien ? Jàck haussa un sourcil. Soit un tour de passe-passe, soit un mutant. Enfin un mutant qui fait des étincelles dans ses doigts, c'est pas vraiment le genre de truc qui font flipper. Sa peut-être simpa en camping, mais à part ça.... Il continua sur le ton de la discussion :

Et normalement, là, c'est le moment où vous m'offrez une cigarette, dites Shazam et me l'allumez non ? Sinon se serait trahir un méchant manque de savoir vivre. Enfin, je dis ça, je ne dis rien....

Donc, ce garçon ne savait pas qui était Terence. Mais surtout, au-delà de ça, il se la jouait insolent. Le genre de mec inconscient qui ne cesse d'en rajouter jusqu'à ce qu'il regrette, tant ce qu'il se prend en retour dans la tête renvoie la proportion au jardin d'enfants. Le gamin parla de Simpsons, une série que le Collabo n'avait jamais regardée, de produits pour la vaisselle et de rencontres coquines. Ah, soit c'était un amateur de télévision avec de sacrés goûts de chiotte, soit il se la jouait. La seconde proposition était quand même bien plus réaliste, puisqu'elle collait parfaitement à la personnalité qu'on associait à cette petite gueule de con. Terry ne releva pas la remarque sur le fait qu'il s'endormait. Comme on dit : il n'y a que la vérité qui blesse. Là, le gamin étant loin du compte, Terence n'était pas concerné. Ses piques glissaient sur lui comme l'eau sur les plumes du proverbial canard.

Ensuite, Jacky boy confirma bien qu'il n'avait aucune idée de qui il avait affaire. Et qu'en plus, c'était le cadet de ses soucis. L'homme d'affaires haussa les épaules. Ca, c'était le problème de l'autre, pas le sien. Et il pouvait assez rapidement se rendre compte d'à quel point c'était son problème. Mais la partie ne faisant que de commencer, il était bien trop tôt pour enseigner le respect. Terence écouta à peine la suite, qui n'était qu'un ramassis de suppositions foireuses, au total opposé de la vérité. Lorsque la tirade fut terminée, sur une conclusion digne de demeurer dans les annales, Terence éclata de rire. Un rire sans joie. Et c'est tout.

De toute manière, l'autre n'avait pas fini de réagir. Le fait de se faire appeler "pigeon", ce qui là était bien la vérité, le lança dans un nouveau discours moralisateur. Non, sérieux, ce gamin-là parlait trop. En plus de raconter sa vie inintéressante, dont le récit aurait fait s'endormir n'importe qui, il continuait d'assumer des choses sur celle de Terry. Ce dernier, intérieurement, était partagé entre deux envies. Celle d'éclater de rire, encore, et celle de dégommer l'autre, envoyer son corps en flammes s'écraser sur les restes de l'appareil. Il opta pour une troisième solution, rester impassible. Ce qui était la plus difficile pour lui. Mais s'il explosait maintenant, il ne pourrait pas profiter du moment où l'autre se rendrait compte de sa bêtise. Donc, il garda le silence.

Et après s'être allumé une clope, il aurait parié n'importe quoi que le jeune homme allait se sentir obligé de dire quelque chose. Lui offrir une cigarette ? Certes, malgré le prix du tabac, Terence avait largement les moyens de s'acheter l'usine la plus proche qui fabriquait les clopes, mais là, il ne se sentait pas d'humeur à même lui offrir un simple regard. Il laissa couler quelques secondes, avant de prendre une longue, longue bouffée. Puis il se tourna vers le gamin, et recracha la fumée dans sa direction.

"Shazam." fit-il.

Que faire ? Que dire ? Entrer dans le jeu de ce minable ? C'était tentant, mais l'autre ne manquerait pas de répondre et de se montrer encore plus chiant. Mais là, Terence n'avait pas grand chose à faire.

"Le savoir-vivre, c'est pour les autres. J'ai suffisamment vécu pour savoir qu'il ne vaut pas la peine de s'en encombrer, petit."

Première chose, sur un ton très calme, ne reflétant pas vraiment ce qui se passait à l'intérieur.

"Je dois être bien plus riche que tu ne le seras jamais. Il ne doit me rester que... quoi, un barreau à grimper sur l'échelle sociale ? Et encore, c'est parce que j'ai des projets qui dépassent ta compréhension. La différence fondamentale entre toi et moi, c'est que moi, je n'ai pas peur d'employer tous les moyens pour arriver à mes fins. Mes principes n'en sont pas vraiment, si tu vois ce que je veux dire."

Pourquoi racontait-il tout ça ? Une perte de temps. Mais non, le chef des Collaborateurs, quelque part, avait envie d'entendre une réplique. Juste pour voir ce que ce pauvre gosse avait dans le bide. Oh, il avait de la répartie, mais jusqu'à quel point ?

"Oh, que c'est bon d'être méchant." lâcha-t-il, sur un ton doucereux, en reportant le regard sur l'horizon new yorkais.

L'ennui quand on croise un con.. c'est qu'on est en face d'un con. L'autre le laissait parler, tant mieu. Mais une chose en particulier amusait Jàcky. L'air condescendant que prenait son interlocuteur. Comme s'il avait tout vu, tout lu, tout entendu, avait tout compris et en avait fait un essai sur le sujet. Donc il était devant quoi ? Un vieil intello blasé qui fait des étincelles avec ses doigts. Il en tremblait de peur. Ou pas. En tout cas cet étrange bonhomme tentait apparemment de façon désespéré de ne pas réagir. De l'avis de Mister Campillo, le vieu était intimidé. Il ressemblait à ce genre de vieux pervers qu'on voit dans des séries policières.

Jàck se mit alors à réfléchir longuement. Ce devait être un guide ou un responsable de l'entretien de la tour en fait. Peut-être un agent immobilier sur la fin de carrière au pire. Quand Jàck acheva se qu'il pensait l'exemple type de la vie de looser du bonhomme celui là lança un rire. Une sorte de rire comme celle de Ganondorf dans Zelda. Ou celle de la team Rocket de Pokémon, au choix. Il lâcha, amusé :

Avouez que votre machiavélique rire de sorcier, vous le travaillez depuis longtemps. C'est pour dire quoi ? Que vous êtes le méchant monsieur qui va me pourrir ma vie en arrêtant de ramasser mes poubelles ? Ou vous voulez me faire croire que vous avez posé une bombe dans la tour et que si je suis vilain vous la ferez exploser ?

Le coin des lèvres du jeune étaient relevées. Il s'amusait, tout simplement. Par contre, après la demande de cigarette, il y eut un blanc... Et là, le schnok fit preuve d'humour car il cracha la fumée au visage de Jàck avant de dire Shazam. Ou inversement. Medic ne releva pas. Aucun intêret :

Peut-être que vous n'avez pas le temps, les moyens ou le charisme d'avoir un minimum de bonnes manières mais... On comprend pourquoi vous avez l'air triste. Vous avez jamais trouvé chaussure à votre pied c'est sa ? Une petite chérie à couver....

La remarque pourrait être considérée comme blessante, et alors ? Par contre Jàck eut un léger fou rire en entendant le récit de l'homme. Un grand méchant, ouuuuh, sa fait peur.

Vous êtes une sorte de père fouettard moderne c'est ça ? Vous avez pensé à ouvrir une page sur je ne sais quel réseau social intitulé : Moi le grand méchant qui vous fait tous peur. Sérieusement en gros vous êtes un sorte de vendeur de camelote qui à trouvé le filon et qui pête au dessus de son derrière c'est bien sa ? Tout les moyens ? Qu'est-ce que vous savez de moi ? De mes objectifs. Est-ce parce vous avez du quoi...tabasser deux gosses qui vous avaient volés votre stock de tapis que vous vous croyez sans peur et sans pitié ? Pas de principes ? Comme les trois quarts des gens de ce pays mon cher...

L'homme se retourna et là, Jàck eut un nouveau sourire. L'autre se prenait-il réellement pour un méchant ? Une image traversa la tête :

Vous n'êtes pas dans la légalité là... vous avez oublié votre petit panneau, attention, vendeur de tapis méchant, défense d'approcher.

Un instant de réflexion suivi. Ouvrir son propre paquet ou.... Jàck s'approcha de l'homme, attrapa vivement la cigarette que ce dernier avait commencé à fumer. Medic la fixa un instant. Bah, elle n'était fumée qu'à un tiers. Il s'adossa à nouveau à la balustrade, aspira une grande bouffée avant de lâcher un :

Merci, c'est bien mondain de votre part.

Terence n'avait jamais croisé un mec capable d'aligner avec autant d'aplomb les théories fumeuses. Pour la peine, il aurait bien pris un morceau du métal de la rambarde pour lui fondre une médaille. Le début de ce qui pouvait arriver était juste, il pouvait lui pourrir la vie. Mais l'histoire des poubelles, passons, l'histoire de la bombe, c'était de la gnognotte, à côté. Pourquoi faire exploser la statue de la liberté ? Pourquoi priver New York, les Etats-Unis, d'un symbole qui rapportait de l'argent, tout ça pour donner une leçon à ce petit con ? Oh, non, il y avait bien mieux que ça.

"Je ne suis pas un terroriste. Faire exploser ce monument juste pour toi, c'est bien plus que tu ne le mériterais. Tu t'accordes bien trop de crédit, et ça, ça va finir par te jouer des tours, surtout face à ceux qui peuvent te créer les vrais ennuis."

L'autre poursuivit avec ses hypothèses. C'est dingue ce qu'il était doué pour tomber à chaque fois à côté. Les bonnes manières, ça se faisait entre gens civilisés. Et là, les conditions n'étaient franchement pas remplies. Commencer la conversation en sortant la phrase bateau la plus con du répertoire montrait bien qu'il ne fallait pas s'attendre à grand chose de ce jeune-là... Avec l'âge, ça risquait de devenir bien pire.

"Tu vas continuer longtemps à m'inventer une vie ? La tienne est tellement pourrie que tu veux vivre celle des autres ?"

Terence ne se souciait pas de sortir des remarques blessantes, comme l'autre tentait vainement de le faire depuis le début. Mais il se lassait déjà de cette discussion qui n'aurait jamais dû commencer, ou alors, qui aurait dû s'achever après la première phrase par une grande chute depuis la plate-forme. Le fou rire dut passer largement au-dessus de la tête du Collaborateur, tout comme le début de la tirade suivante. A autant parler, jamais il ne s'épuisait ? Tant qu'il ne faisait que ça...

"Hmm ? Les trois-quarts ? Tu les as rencontrés ? Quitte les jupes de ta mère et va voir le monde, avant de raconter des conneries. Tu crois faire partie du quart restant ?"

Pendant le passage sur les tapis, l'attention de Terence s'était fixée quelque part ailleurs, loin de la statue. Mais l'autre aimait bien creuser ses conneries, aussi il reprit son histoire de tapis. En quoi un vendeur de tapis était-il méchant ? A moins que ça ne soit une référence aux Arabes islamistes et terroristes, mais ça manquait franchement de finesse. Le chef des Collaborateurs décida qu'il allait se retirer, il avait perdu son temps de méditation, une voix insupportable ayant bourdonné à ses oreilles pendant de longues minutes. Mais quelque chose le fit changer d'avis. L'autre vint lui prendre sa cigarette.

"Tu te crois plus intelligent que moi, hein ?" fit Terry en pivotant.

La cigarette qu'avait Jacky boy dans la bouche prit feu. Par une petit flamme, non, ce qu'il fallait pour que la clope brûle en deux ou trois secondes. Profitant de l'instant, il allait lui coller un coup de poing dans les côtes. Précisons que ledit poing était couvert de feu. D'ailleurs, il en mit un deuxième, de l'autre main, avant de se reculer, et de... s'allumer une nouvelle cigarette. Et de demeurer face au gamin.

"Maintenant, soit tu dégages d'ici et j'épargne ta tête de con, soit je fais en sorte que tu vives le restant de tes jours sans que personne ne puisse te reconnaître."

Là, le ton était franchement menaçant. Si l'autre ne le prenait pas au sérieux, c'est que l'inconscience était un art de vivre chez lui.

Sa y est, l'homme commençait à prendre tout ça au sérieux. Peut-être commençait-il à être en colère. Ou était-il buté comme n'importe quel petit fonctionnaire. Dans tout les cas Jàck commençait à s'exciter. Il allait faire quoi, lui sortir un sermon débile ? Ou faire un meurtre en plein public , boouuuuh, il avait peur. Il écouta alors l'homme taper son splitch. Déja, il admettait ne pas avoir le courage d'être un terroriste. Cool pour lui, il devrait écrire un livre. Jàck passa une main dans ses cheveux.

Monsieur juge la valeur des gens en plus. Mais c'est chouette dites donc ! Vous voyez un mec, vous vous dites, tiens, lui il vaut un immeuble trois étages, tiens, lui six. Han mais je l'avoue, je suis très partial dans mes goûts et j'ai une forte estime de moi; C'est pas de ma faute si votre gueule de con ne vous à pas permi une confiance en vous. Par contre, il est évident que si quelq'un peut me créer des ennuis ben...c'est pas vous. .

Nan mais en plus, il continuait à se prendre pour Sir je sais tout de la grande clairvoyance. Le genre de vieux bien lourds, bien têtus. Mais bon, les cinquante ans étaient toujours une phase difficiale. Après avoir insulté un étudiant, il allait chercher une petite jeune et tromper sa femme avec. Comme tout les vieux en pleine crise existentielle.

Peut-être que je me trompe réellement sur toi et que tu es quelqu'un de très bien, tout ce que je sais de toi, c'est que ta une tête qui me revient pas. Après, non, ta vie monotone, j'en veux pas, merci beaucoup. La mienne est extraordinaire, pleine de rebondissement. Alors Chuuuut ok ?

Oui c'est ça, l'autre avait eu une petite promotion et ne se sentait plus pisser à vrai dire. Jàck serra le poing. Il avait pété un cable le schnok ou quoi ? Lui dire de rentrer chez sa mère. Premièrement, dans le cas présent, il en avait pas grand chose à foutre. Deuxièmement, de toutes façons, elle est crevée. Comme les sushis. Enfin bref. Le mutant répondit du tac au tac :

C'est bon, t'as bientôt fini de te prendre pour la bibliotèque du coin du genre tu sais tout et tu controles ton univers ? Comme tout le monde, t'as des trucs qui te dépassent apparament, mais t'es trop ahuri pour le comprendre. En fait, la tête de con, c 'est surtout toi non ?

Le mec continuait à alterner entre regarder le vide et le regarder. Jàck commença réellement à s'énerver. Et là, tout se passa au ralenti. Il vit une flamme près de son visage. Puis il vit du feu autour du poing de l'homme. Et il encaissa le premier coup. Il sentir sa chair se consumer, attraper des cloques, la totale. Il allait avoir le ventre en sale état. Puis le second coup le fit se tordre en deux de douleur. Il ferma les yeux. Dieu que ça faisait mal. Il laissa ses pouvoirs se déclancher, guerissant la légère brûlure à la lèvre et guérissant la peau de son ventre, réactivant les cellules, en multipliant d'autres. Il se redressa, l'impact ayant fait de gros trous calcinés sur son T-shirt. Par contre, la peau en dessous, au lieu d'être rouge et à moitié calcinée, était blanche et douce comme une peau de bébé. Comme s'il n'y avait rien vu.

Putain mais t'es débile ou quoi ? Tu sais combien sa coûte un T-shirt comme ça ? Sa y est t'as un pouvoir qui fait du feu, t'es content, tu te la pêtes. C'est cool, écrit un livre.... Pauvre tâche.

Jàck Campillo décocha alors un direct de la droite vers le visage de l'homme. On ne touche pas à son t-shirt ! En fait, il n'avait même pas réfléchi à analyser le pouvoir de l'homme. L'important était la vengeance. Surtout que Jàck avait dû souffrir et pour encaisser et pour se soigner.

Après un autre baratin insignifiant, le gamin affirma que Terry n'était pas l'homme à lui créer des ennuis. Oui, là, le chef des Collaborateurs était d'accord. Les ennuis, c'était un stade qu'il avait depuis longtemps dépassé quand il voulait faire mal à quelqu'un. De vraies emmerdes, du genre qu'on ne souhaiterait même pas à son pire ennemi, voilà plutôt ce que pouvait créer Terence à ce gosse de riches pourri-gâté. Il ne releva pas, attendant de voir jusqu'où Jacky boy pouvait continuer de creuser. Creuser, ça aurait pu être sa tombe, mais la mort, ça n'arrive qu'une fois, et ce genre de personne méritait de la voir arriver, à petit feu. Ensuite, à la surprise de Terence, l'autre se mit à le tutoyer. Tiens, il était descendu encore d'une marche dans le respect. La leçon n'en serait que plus grande.

S'il avait une vingtaine d'années, certaines de ses réflexions relevaient d'un âge mental inférieur, aux alentours de la dizaines de piges. L'autre comparait les vies, okay, fais donc... Il n'était pas une connerie près, après tout. Etait-il inconscient ? Oui, certainement, puisqu'il ne mesurait en aucun cas le danger qui planait sur lui. Et encore, à cet instant, il ne représentait pour Terence qu'un de ces milliers d'êtres humains bons à finir en cendre après s'être lentement consumés. Le gosse lui retourna le "tête de con". Oh, il était aux abois, il ne parvenait pas à sortir ses propres répliques, il fallait qu'il reprenne celles des autres.

Puis vint le passage de la cigarette, qui déclencha ce qui pesait depuis le début sur la tête du jeune homme. Une petite flambée, puis deux coups enflammés dans les côtes, ce qui eut pour effet de laisser deux trous dans le t-shirt, dévoilant une peau brûlée, mais assez peu. Et là, Terry comprit ce qui rendait ce gamin si supérieur. Il était un Mutant, il disposait d'un facteur guérisseur. Jusqu'à quel point est-ce que son pouvoir était efficace ? C'était une question intéressante, et le Collabo hésitait à y répondre sur le champ. Mais auparavant, il essuya une réplique qui aurait pu le déstabiliser si elle n'avait pas été aussi pathétique. "Pauvre tache". Oh, il y avait du niveau, c'était indéniable.

"Tellement matérialiste... Le prix d'un t-shirt..." soupira Terence, avant d'éviter le coup qui suivit.

Il s'était attendu à ce que l'autre se défende. Faisant un pas en arrière, il fit apparaître autour du gamin un mur de feu. S'il traversait, il aurait mal, il guérirait, mais il s'exposait à bien pire que quelques gentilles flammes.

"Ainsi, tu es un Mutant. J'espère pour toi que tu es recensé, parce que le gouvernement réserve un sort peu enviable à ceux qui ne respectent pas cette loi. J'imagine que tu as déjà entendu parler des Collaborateurs, non ?"

Une nouvelle barrière de feu apparut, cette fois à l'entrée du passage menant aux escaliers qui permettaient de redescendre. Autant que personne ne vienne les déranger.

"Allons, tu vas être un gentil garçon, tu vas me donner ton nom, et je te laisserai partir. Je préfère la chasse, plutôt que d'avoir directement mes proies entre les mains."

Ca aurait pu sonner comme une parole en l'air, mais ça ne l'était pas. Si le gamin donnait son nom, Terry ferait disparaître les flammes, et il laisserait partir le petit con. Ensuite, il le retrouverait, et là, Jack souhaiterait franchement ne jamais avoir engagé la "conversation" avec lui au sommet de la Statue.

Jàck eut un coup de flippe. Premièrement parce que le type était parvenu à éviter son coup de poing. L'ennui c'est qu'à présent il était un peu entouré et que ça avait l'air de brûler quelque peu. Autant Jàck pouvait avoir peur quand il y'avait de l'espace pour fuir. Mais acculé, son instinct de survie prenait le dessus. Et son instinct de survie lui fit dégainer son Colt Springfield 1911. Sachant qu'on ne pouvait rien voir à travers les flammes, il dirigea son arme par le son. Heureusement que l'autre con était une grande gueule :

Han, tu savais pas que je me soignais avec le nouveau garnier qui garde la peau lisse ? Je suis un mutant.. vous auriez du bosser à ScotlandYard, vous auriez fait un malheur. Et pour vous répondre, évidement que je suis recensé. Je ne suis pas suicidaire. Enfin, pas entièrement. Par contre, franchement, les collaborateurs, sa ne me dit...Rien. C'est quoi, un groupe de métal des années deux-milles ? Scusez moi si je suis pas rétro à ce point là.

Jàck tendit l'oreille, entendant une seconde déflagration. Une autre bande de flammes ? Sa ne semblait pas le viser directement. Medic soupira. Dieu qu'il faisait chaud là dedans.

Vous ne saviez pas que maman m'avait dit de ne jamais donner mon nom aux inconnus ? Mais bon j'ai un faible pour vous alors je vais vous le donner. Moi c'est Daffy Duck, vous me trouverez au 2 rue de la Salsepareille, au village des Schtroumpfs. Non mais vous vous prenez pour qui ? Trop bien j'fais du feu j'me prends pour un caïd c'est ça ?

Jàck eut un rire bref. En vrai il flippait. Mais sa voix semblait plus qu'assurée pourtant. Genre il se moquait de tout. Il avait en tout cas situé à sa voix où se trouvait l'homme.

Non mais vous me prenez pour le petit poney que vous allez chasser avec vos trois feuilles de salades ? Qui vous dit que vous allez m'avoir. Maintenant baissez ces murs de flammes et buvont tranquillement dans un bar comme des adultes responsables.

Jàck savait qu'il n'allait pas baisser le mur de flammes. Il était près à tirer, à la première impression de danger supplémentaire comme le mur qui se rétrécit ou du feu qui apparait en plus. Il restait crispé sur la détente. De toute façon, à moins d'avoir des rayons X, L'homme ne pouvait pas voir l'arme braquée sur lui.

Scotland Yard. Tiens, le gamin qui avait l'air de tomber d'une autre planète, tant ses connaissances touchaient des fonds abyssaux, voilà qu'il évoquait la police de Londres. Peut-être l'avait-il lu quelque part. Il aurait quand même été plus crédible en parlant du NYPD. Pourquoi un Américain se serait-il donné la peine d'aller bosser chez les Angliches ? Terry ne releva pas. Jacky boy ne connaissait même pas les Collaborateurs. Il devait bien débarquer d'une autre planète, ou alors il vivait en autarcie, fermé à tout ce qui se passait, pas dans le monde, mais à New York. Hadès soupira. Ce mec-là ne méritait même pas qu'on le force à rejoindre le groupe. Il était plutôt du genre à être enfermé à vie dans une cellule capitonnée, où il pourrait ressasser toutes les conneries qu'il débitait à la seconde. Il finirait pas en devenir dingue. Cette pensée fit sourire Terence.

Bien entendu, le gamin prisonnier des flammes n'avait pas envie d'être coopératif. Il livra un nom factice, une adresse fictive, et dut être vachement fier de son attitude. Le chef des Collaborateurs termina sa cigarette, qui suivit le même trajet qu'à peu près tout le reste auparavant, et en sortir une autre, qu'il alluma comme les précédentes. Puis il fit le tour de la torche, manquant par la même une bonne partie de ce que disait son prisonnier. Quand il arriva de l'autre côté du cercle de flammes, le gamin avait fini de parler. Terence avait cependant entendu la fin... "dans un bar comme des adultes responsables". Il éclata de rire.

"Ah, oui, des adultes responsables ! Très bonne idée."

L'autre devait avoir capté le changement, et s'être retourné. Le mur grossit légèrement, réduisant le cercle de façon à ce qu'à l'intérieur, le gamin devrait se serrer un peu pour ne pas se brûler. Quoiqu'il devait faire suffisamment chaud à l'intérieur pour qu'il soit cuit au bout d'un moment. Terry s'avança, et sa main traversa le rideau de feu. Il n'était pas dans l'intérêt de Jacky de faire quoique ce soit à cette main, parce qu'il risquait d'y laisser beaucoup trop. Le risque était... oui, bien trop grand.

"Donne-moi donc ta carte d'identité, et je te laisserai filer. Tu as un sacré culot, tu as du cran, je vais te laisser une chance de me revoir un jour."

Peut-être se renseignerait-il un peu plus sur les Collaborateurs. La photo de Terence L. Firestone apparaissait sur beaucoup de sites internet. Il était même présent sur l'officiel du gouvernement. En d'autres circonstances, Terry aurait saisi l'occasion d'aller boire un verre. Mais là, le gamin avait poussé son problème un peu trop loin avant de parler de trouver un bar. Oh, et puis, à la réflexion, c'était un Mutant. Il valait mieux l'avoir de son côté, comme beaucoup d'autres, plutôt que de la laisser dans la nature, et qu'il rejoigne un jour la Confrérie, ou l'équipe de Frost...

"Je peux t'aider, tu sais. Il faut juste que tu arrêtes d'être aussi con avec moi." ajouta-t-il donc, après quelques secondes.

Un refus de collaborer serait un test poussé pour le pouvoir de guérison. Mieux valait donc ne pas chercher, à moins d'avoir plusieurs jours à passer dans la souffrance, le temps que le don n'agisse entièrement...

Jàck commençait à réellement flipper. Le son s'était déplacé. Jàck aussi. L'ennui c'est que la chaleur faisait "fondre" son adrénaline. Naturellement, Jàck n'est pas du genre à faire du Zèle. Le jeune homme avait compris qu'il n'avait pas l'avantage pour cette fois-ci. Une main apparu à travers les flammes. Techniquement il pouvait viser la tête de l'homme celon un calcul rapide avec l'emplacement de la main. Il abaissa le chien de l'arme. Et s'épongea un instant le front, le temps de réfléchir. Il était face à un homme qui était capable, autant par ses pouvoirs que son influence, de pouvoir créer des murs de flammes dans la statue de la liberté en toute impunitée. S'il le tuait..comment sortirait-il de là ? Au fond, Jàck n'avait pas un mauvais fond. L'idée de tuer quelqu'un le bloquait pas mal aussi. Et si il ratait son coup.

Medic savait l'étendue de son don. Face à des flammes aussi puissantes, s'il ratait son coup, il prendrait longtemps à guérir. Et il n'est pas insensible à la douleur, au contraire. Et s'il meurt avant, il n'aurait pas la facultée de se soigner. Jàck baissa son bras et désarma son arme dans une série de clics clics aisément reconnaissables avant de ranger l'arme. L'homme avait gagné. Jàck farfouilla dans son blouson et sortit une carte barré en gros du mot mutant, sur laquelle on pouvait lire son nom, âge, non mutant, nationalité britannique et une adresse londonnienne. Il n'était pas aux états unis depuis assez longtemps pour avoir modifié ceci. Et il faut avouer qu'il était fier de sa nationalité. Enfin là, il n'avait pas vraiment le temps d'être fier. Il déposa doucement la carte dans la main qui traversait les flammes :

Ok ..ok la voilà. J...je vous présente mes excuses. Ne vous inquietez pas c'est une vrai. Je voulais pas en arriver aussi loin... Alors si vous vouliez bien baisser ...enfin enlever vos flammes là.

Il se demanda ce que pouvaient-être les collaborateurs. Peut-être une genre de CIA ou un truc comme ça. Jàck s'épongea encore le front. Il savait que si l'homme ne faisait pas disparaître les flammes en vitesse il allait finir par étouffer. Ou cuire au four, au choix. Et à vrai dire, il n'avait pas vraiment envie d'être un Jàcky rôti aux pommes.

Hum...et...euh... pour le verre, c'est moi qui vous l'offre okay ? Mais...vous parlez de m'aider....m'aider juste à sortir de là où.... vous parlez à plus grande échelle ? Même si le fait que vous me sortiez de là soit très très interessant.

Jàck semblait sur le bord de la crise nerveuse et son débit de paroles était saccadé, il lui arrivait de bafouiller. C'est fou ce qu'on peut avoir peur de la douleur. Jàck est dans ce genre. Il est lâche. Il le sait, mais ça ne l'empêche pas de trouver toujours des ennuis. Jàck tenait à sa vie.

Terry avait tout son temps. Mais il ne tiendrait pas non plus éternellement avec la main tendue à travers les flammes. Il ne sentait pas la chaleur, il ne brûlait pas, même sa veste était épargnée. Et tout ça, le gamin emprisonné ne pouvait pas en dire autant sur son propre cas. Après un court instant, Terence perçut le bruit d'un arme à feu, un flingue. Il haussa les sourcils, puis un léger sourire apparut sur ses lèvres. Tiens, le jeune Mutant avait donc eu le cran de sortir son joujou. Mais à présent, il avait compris, puisqu'il était en train de le ranger. De toute manière, s'il avait tiré à travers le rideau de feu, la balle serait ressortie dans un drôle d'état. Oui, elle serait ressortie, mais après avoir eu très chaud, et il est assez peu probable qu'elle aurait pu pénétrer quoi que ce soit. Mais ça, nous ne le saurons jamais. D'une voix beaucoup moins assurée que précédemment, le petit prit la parole, confirmant bien qu'il préférait coopérer plutôt que de risquer quoi que ce soit de plus.

Le chef des Collaborateurs sortit la main de la prison-brasier et regarda la carte qu'il tenait. Jàck Campillo, de nationalité britannique, et domicilié à Londres. Tiens, ça expliquait la référence à Scotland Yard. L'accent des Angliches n'était pas percevable, il devait avoir rapidement pris le pli ici. Vingt-deux piges. Sur ça, Terry avait visé juste, il était dans la tranche 20-25 ans, celle des plus chiants à gérer. Médic. Son talent devait donc consister en la guérison. Sur lui, c'était certain, mais il pouvait probablement aussi soigner les autres. Sortant son téléphone, Terry prit une photo de la carte. Pendant ce temps, Jacky avait reprit, parlant du verre qu'il avait évoqué, et de la fameuse aide... Alors que la photo de la carte partait par MMS, les flammes s'évanouirent, y compris celles bloquant l'accès à la plate-forme.

"Tu as fait le bon choix, Jacky boy." dit-il, sur un ton neutre, en rendant sa carte au British.

Tirant une cigarette de son paquet, il combla le mètre le séparant du jeune homme, et la lui colla dans la bouche, avant de l'allumer. Le tout en demeurant impassible, sa propre cigarette achevant déjà de se consumer.

"Tu as un sacré cran, mais je vais mettre ça sur le compte de l'ignorance." ajouta-t-il, alors que son regard s'arrêtait sur les trous qu'il avait faits dans le t-shirt.

Il s'était retenu. Pas en force, mais en intensité. S'il n'avait pas attaqué le premier, pour se défouler, pour extérioriser le ras-le-bol qui était monté en lui, Terry n'aurait probablement pas découvert le pouvoir de Médic. Il passa le bout du doigt sur la peau, où ne demeurait aucune trace de brûlure. Puis il s'éloigna, son regard se posant une énième fois sur l'horizon.

"L'aide que je peux t'apporter est... particulière. Je ne fais pas de charité. Je travaille pour le gouvernement."

Il tourna la tête vers Jàck. Il était curieux. Quelle était l'étendue du pouvoir ? Comment était-il arrivé aux Etats-Unis ? Quand ? Pas que les informations seraient utiles, mais on ne savait jamais, Terence était du genre à aimer en savoir un maximum sur les gens qu'il croisait, quitte à faire le tri dans ce qu'il apprenait.

"Allons en ville, boire ce verre."

Et sans attendre quoi que ce soit, il prit les escaliers, qu'il descendit jusqu'en bas. Personne ne l'arrêta, ne lui posa de questions sur ce qui s'était passé en haut, rien. Arrivé au pied de la statue, il prit la direction de sa propre vedette, et grimpa à bord.

"Larguez les amarres !" lança-t-il, de bien meilleure humeur à présent.

Les secondes qui passèrent après que Jàck eut donné sa carte d'identité lui parurent des heures. Une dizaine de secondes de pur stress. L'homme allait-il tenir parole ? Où allait-il finir par le calciner ? Jàck ayant dépassé les limites, les deux scénarios étaient possible. A moins que l'homme ne le laisse cuire là où il est. Finalement les flammes s'évanouirent et Jàck put voir un instant un portable. L'homme avait peut-être copié sa carte. Ou prévenu sa femme qu'il serait en retard au dîner. En fait, il n'en savait rien. Déja, l'important, c'était d'être resté en vie. Il prit quelques instants pour reprendre son souffle avant de reprendre la carte d'identitée. C'était pire que le Saharah là dedans. Bon, personne n'était venu interrompre l'homme. Pourquoi ? Medic commençait à craindre le pyromane. Ce dernier lui dit qu'il avait fait le bon choix. En même temps dans la situation où il se trouvait, il valait mieu.

Jàcky boy. Sympa comme surnom. Il laissa l'homme lui mettre une cigarette dans la bouche, bien qu'un peu surpris. Bon bah, c'est toujours une cigarette d'économisée. L'instant d'après elle s'allumait. Rien à dire, c'était quand même classe. Il bafouilla un :

Euh merci.

C'était à la fois pour la cigarette que pour le fait que l'autre "admre" son cran. Bon, il avait surtout foncé tête baissé. Bon étant donné que l'autre lui avait offert une clope, il le laissa regarder les "blessures" qui n'en étaient plus. Jàck ne pourrait jamais faire le mec avec des "blessures de guerres" étant donné qu'il cicatrisait sans trâces. Il réparait et multipliait les cellules manquantes, retissant les chairs. Il regarda l'homme repartir. Qu'avait-il avec l'horizon. Une femme disparue ? L'homme tourna de nouveau la tête vers Medic. Peut-être voulait-il en savoir sur un pouvoir que l'homme, malgré sa puissance, ne maîtrisait pas. Ou il songeait peut-être à le faire rôtir. L'étudiant en médecine tira une longue bouffée sur sa cigarette. Histoire de se calmer, son rythme cardiaque ayant augmentée quand il était dans le cercle de feu. Il vit l'homme descendre. Jàck le suivit et monte à sa suite sur la vedette. Estomaqué. Ce type possédait son propre navire, son équipage et tout.

Il ordonna de démarrer, apparamment plus...calme. Voire gai. Jàck s'accouda à la rambarde, sa cigarette à la bouche et demanda :

Le gouvernement...Je croyais qu'il pourchassait tout les mutants. Pour les détruire. Que c'était pour ça que la confrérie multipliait les attentats. Je crois que c'est la confrérie. Quel est le genre de boulot que l'état peut vous charger. Et que vous pourriez me donner ?

Jàck tourna la tête vers l'homme, le détaillant de la tête au pied. Sa faisait bizarre de se dire qu'un mec qui semblait comme monsieur tout le monde possédait autant de... d'influence ? Medic regarda l'eau fendue par la vedette. L'eau bleu-vert...

Et surtout... Vous vous appelez comment ?

En guise d'équipage, sur le petit vaisseau, il n'y avait qu'un homme, qui s'occupait de toute la partie machinerie. Tout ça échappait à Terry, mais surtout parce que ça ne l'intéressait pas. S'il avait fait l'effort de se pencher sur le fonctionnement des moteurs, il aurait pu tout gérer seul. Mais déléguer était un avantage de chef dont il ne se privait pas. Arrivé à la barre, située à l'arrière, sur un pont découvert, il attendit que le bateau s'ébroue pour le manœuvrer. Le jeune British s'appuya à la rambarde, et reprit la conversation interrompue là-haut. Ah, le gouvernement pourchassant les Mutants... Ca n'était pas tout à fait vrai, même s'il y avait une grande, grande part de vérité là-dedans. Et la Confrérie. La mine de Terence s'assombrit légèrement, furtivement. S'il tenait le leader, ce dernier passerait les plus longues heures de sa vie. Les terroristes qui se permettaient de commettre des attentats contre l'autorité. Ces Mutants devaient être arrêtés et punis. Jack n'avait pas l'air très au courant de ce qui se passait à New York. Il ne connaissait pas les Collaborateurs, il n'en savait pas beaucoup sur la Confrérie... Et si son attitude au sommet de la grande dame était demeurée butée et provocatrice, il n'aurait jamais pu avoir la chance d'apprendre quoi que ce soit... Mais heureusement, la raison l'avait rattrapé.

"Le gouvernement traque les Mutants, parce que les Mutants sont une menace pour la paix, la sécurité et la tranquillité de la société humaine. Mais jusqu'à l'élection de McAllister, jamais une solution n'a été trouvée pour les arrêter... Jusqu'à ce que j'ai une longue discussion avec le Président."

Terence, membre du parti depuis longtemps, militant actif, avait attendu l'officialisation de l'élection, et il se revoyait, peu après l'annonce des résultats, dans le bureau ovale, en tête-à-tête avec le nouveau chef de l'Etat. L'entretien avait duré un moment, pour la mise en place des conditions, les assurances de l'un et de l'autre, et puis, finalement, ils étaient tombés d'accord. Les Collaborateurs étaient nés.

"Le seul moyen d'arrêter un Mutant, c'est d'en être un soi-même. Qui connait mieux un porteur du gène X qu'un autre porteur de ce gène ? Le gouvernement se sert des Mutants pour traquer leurs semblables. On appelle ce groupe les Collaborateurs. Et le patron, c'est bibi."

Terry cracha une longue bouffée de fumée, qui dessina dans les airs... un grand sourire, avant de se disperser. Le quai d'en face se rapprochait, bientôt la vedette toucherait l'autre côté. C'était quand même bien plus rapide, en plus d'être gratuit, que la navette, où l'on voyageait serré contre des touristes chiants et sans intérêt. Jacky, qui avait déjà donné son nom, finit par demander comment s'appelait l'homme qui avait manqué de le cuire au barbecue. Ce dernier tourna la tête, lentement, avant de plonger une main dans la poche intérieure de sa veste. Il en tira une carte qu'il tendit au jeunot. Une carte de visite blanche, simple, avec le logo du gouvernement, et un nom. Terence L. Firestone. Rien de plus. Pas de numéro. Parce qu'on appelait pas Terry, c'est lui qui vous contactait.

"Tiens."

Il n'avait pas répondu à la question précédente, à propos de ce qu'il "pouvait lui donner". Tout simplement parce que Terence ne donnait pas. Les conditions d'une rencontre avec un Mutant n'étaient en général pas très amicales, et tout dépendait de la bonne volonté de celui qui se trouvait en face. Il laissa passer quelques secondes, alors qu'un homme attendait pour amarrer la vedette.

"Tu peux te régénérer. Mais est-ce que tu peux guérir les autres ? Tu maîtrises ton pouvoir ?"

Oui, il aimait poser les questions. C'était toujours mieux que d'y répondre. La vedette effleura le quai.

[HJ Maintenant, on peut faire un autre sujet, après ta réponse, dans un bar ?]

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